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Publié le
Lundi 11 Novembre 2013
Le quatrième débat national, organisé par le Commissariat général à la stratégie et à la prospective dans le cadre du chantier  Quelle France dans 10 ans ? a ouvert un autre horizon avec une question fondamentale pour l’avenir : « Quel projet pour l’Europe ? ». Le regard croisé entre experts, partenaires sociaux et élus a été enrichi par la participation de représentants britannique, allemand, néerlandais, italien, Bulgare, Autrichien et Finlandais. Les échanges, empreints d’une tonalité inquiète, ont mis en lumière des pistes pour préserver l’Union européenne. Avec un rôle essentiel pour le couple franco-allemand.
Quel projet pour l'Europe dans 10 ans ?

L’Europe ne se porte pas très bien. Voilà un constat partagé, illustré par de nombreux exemples. L’Union ne suscite plus l’adhésion de ses citoyens. Les politiques européennes, élaborées loin d’eux à Bruxelles, leur paraissent vides de sens, déconnectées de leurs préoccupations quotidiennes.

Son manque de légitimité font que les « électeurs se sentent dépossédés de leur pouvoir d’influer sur les décisions qui, depuis la crise, les impactent brutalement. » L’Europe ne protège plus ; au contraire, « les citoyens ont le sentiment qu’elle punit… sauf les riches. » Son fonctionnement bureaucratique inquiète : « Les crèches font l’objet d’un contrôle disproportionné au nom du respect des règles de concurrence. » Comment s’étonner ensuite que les européens voient l’Union comme une contrainte et non une opportunité ?

Le marché intérieur patine. Alors que la politique énergétique a été un des fondements de la construction européenne, le marché européen de l’énergie souffre de contradictions fortes, notamment sur la composition du bouquet énergétique, amené à se diversifier pour préserver l’environnement. Entre la France, qui mise sur le nucléaire et l’Allemagne sur les énergies renouvelables, c’est le grand écart. Au point qu’un intervenant propose de jeter l’éponge : « Constatons que l’union ne peut se faire et contentons-nous d’assurer le fonctionnement technique de l’électricité sur le continent. »

L’espace européen de la recherche ne parvient pas à sortir des limbes, faute d’un budget conséquent et de priorités fortes, sur des thèmes pouvant répondre à des défis sociétaux, à l’exemple des « villes vertes ». Le marché unique du numérique pourrait apporter de 4 à 5% de croissance supplémentaire, en bouleversant des secteurs cruciaux comme la santé et l’éducation, mais son édification n’avance pas.

« L’Europe a deux cœurs et l’un bat plus fort que l’autre. » Ce n’est pas le moindre souci de l’Union, où coexistent un marché intérieur à 28 pays et une zone euro à 18 membres. Peut-on avoir, d’un côté, une monnaie unique et de l’autre, des Etats qui gardent une capacité à dévaluer ? Certains participants estiment que non, d’autres qu’il faut bien s’y faire, sachant qu’il n’y aura plus de nouvel entrant dans la zone euro avant plusieurs années.

Les déséquilibres budgétaires et les divergences économiques entre pays posent également problème. Le dumping social et fiscal a été particulièrement souligné. « L’Union ne peut survivre avec de telles différences. La politique sociale doit figurer dans l’équation. » Mais la France semble isolée dans sa recherche d’un accord social définissant des standards minimum. Pourtant l’instauration un socle social commun apparaît nécessaire à beaucoup, spécifiquement dans la zone euro.

Le risque de désintégration de l’Union européenne n’a pas été minimisé. Mais les participants n’ont pas manqué d’idées pour remettre l’Europe sur les rails. Cependant les alternatives possibles empruntent des chemins parfois très opposés. Faut-il mettre l’accent sur la réduction des coûts pour retrouver des budgets à l’équilibre ? Cela signifierait la mort du « modèle social européen ». Ou, à l’inverse, faire de l’investissement social ?

Puisque les pays ont fait la preuve de leur incapacité de gestion, faut-il transférer la compétence budgétaire à un niveau fédéral ? Ou opter pour un « fédéralisme d’exception » où les gouvernements restent aux commandes, avec la possibilité d’un transfert de souveraineté en cas de crise majeure ?

Le maintien de la monnaie unique réclame des solutions spécifiques. Beaucoup plaident pour une « vraie gouvernance de la zone euro, avec un Ministre ou un Commissaire », dont l’enjeu est de parvenir à un espace monétaire homogène. Si l’Union bancaire apparaît de l’avis général une priorité, certains estiment qu’il n’est pas nécessaire de se lancer dans des politiques plus ambitieuses, en créant un budget commun ou une assurance-chômage européenne.

La crise de légitimité de l’Europe n’appelle pas forcément une réponse institutionnelle immédiate. « Tenter de résoudre les problèmes par la politisation » suscite des craintes chez ceux qui considèrent que l’Union doit d’abord convaincre avec des résultats, comme la diminution du chômage des jeunes. D’autres souhaitent au contraire que la Commission de Bruxelles soit plus politique ou que les parlements nationaux soient davantage impliqués, en supervisant par exemple les travaux du Conseil.

Qui va impulser le changement ? L’Espagne et l’Italie, malmenées par la crise, et le Royaume-Uni qui doit organiser un référendum sur son appartenance à l’Union d’ici 2017, ne pourront être à l’initiative. Pour avancer, l’Europe a besoin que la France et l’Allemagne sortent de « l’attente cordiale » et débattent pour tracer rapidement des perspectives.

 

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