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Communiqués de presse
Publié le
Mercredi 03 Février 2016
Le renforcement des contrôles aux frontières aurait un impact économique substantiel. Si l’abandon permanent du système de Schengen était décidé, le coût économique en serait très élevé : le commerce entre pays de la zone pourrait être au moins de 10 % plus faible se traduisant par une perte de PIB de 10 milliards d’euros pour la France.
Les conséquences économiques d'un abandon de Schengen

Le renforcement des contrôles aux frontières des mouvements de personnes passerait concrètement par le rétablissement d’un contrôle systématique des passeports dans les gares et les aéroports pour les flux européens et internationaux, et par un contrôle aléatoire lors des passages par la route.

France Stratégie a estimé deux scénarios du coût économique qu’auraient les mesures suivantes :

  • un retour à la situation qui prévalait avant les accords de Schengen, c’est-à-dire un contrôle réduit des passages en voiture particulière et un contrôle perlé des camions (scénario 1) ;
  • un contrôle renforcé des passages en voiture particulière et un contrôle systématique des camions (scénario 2).

Cette approche n’envisage pas un contrôle systématique des pièces d’identité lors d’un passage par la route, qui apparaît peu réaliste en termes de faisabilité, compte tenu de la multiplicité des points d’entrée et du volume des flux.

D’après ces deux scénarios, dont les résultats sont présentés dans cette note d’analyse, le coût économique direct à court terme ressort à plus d’un milliard d’euros par an dans le scénario 1 et à 2 milliards d’euros par an dans le scénario 2. Le coût économique de long terme serait évalué à 0,5 point de PIB soit 10 milliards d’euros pour la France et à 0,8 point de PIB pour les autres pays de l’espace Schengen, soit plus de 100 milliards d’euros.

Impacts de court terme et permanents

Le temps de passage aux frontières peut être dissuasif et entraîner une diminution du nombre de touristes sur notre territoire qui se répercuterait dans une baisse globale des dépenses de consommation des visiteurs. Le recul de l’activité touristique a un coût estimé entre 500 millions d’euros (scénario 1) et 1 milliard d’euros (scénario 2).

L’augmentation du temps de trajet domicile-travail des travailleurs frontaliers peut être estimée à partir des valeurs de référence prescrites pour le calcul socio-économique des projets de transport. L’augmentation du temps de trajet des frontaliers, due aux contrôles perlés, engendrerait un coût socio-économique de 250 millions d’euros (scénario 1) à 500 000 euros (scénario 2).

L’offre de travail étant élastique au salaire, un surcoût mensuel dû à l’augmentation du temps de transport, entraînerait une baisse du nombre des frontaliers (de 5000 dans le scénario 1 à 10 000 travailleurs dans le scénario 2), soit une perte de revenus 150 (scénario 1) à 300 millions d’euros (scénario 2).

Le contrôle systématique de l’identité des chauffeurs routiers et de leur cargaison pourrait allonger de 30 minutes (scénario 1) à une heure (scénario 2) un trajet international de marchandises, selon les moyens humains déployés à la frontière pour exercer ce contrôle. La remise en place des contrôles devrait aussi avoir un effet sur les flux de commerce, et donc sur la croissance et l’emploi. Le coût direct pour les importations et les exportations de marchandise par route est évalué entre 120 millions d’euros (scénario 1) et 240 millions d’euros (scénario 2).

À ces coûts économiques, s’ajouterait un coût budgétaire supplémentaire correspondant à l’augmentation des effectifs des douanes et de la police aux frontières : environ 200 millions d’euros pour revenir à la situation qui prévalait avant Schengen (scénario 1) ou proche du milliard d’euros dans le cas d’un dispositif renforcé (scénario 2).

Impacts à long terme

Le ralentissement des flux de marchandises et de personnes à la frontière devrait à long terme coûter à l’économie française un demi-point de PIB, soit plus de 10 milliards d’euros via le canal des échanges commerciaux, d’après une simulation réalisée par le CEPII. Cette perte pourrait être plus proche de 0,8 point de PIB  pour les autres pays de la zone Schengen (qui échangent davantage), soit plus de 100 milliards d’euros au total pour la zone.

Les simulations réalisées montrent qu’un effet dépressif sur les exportations et les importations de la France (entre 10 % et 20 %) à destination et en provenance des pays de l’espace Schengen est à prévoir, effet qui équivaudrait à l’instauration d’une taxe de 3 % environ sur les exportations et les importations françaises à destination de ces pays.

Si les difficultés à passer les frontières sont significatives et permanentes, les migrations intra-UE pourraient elles aussi se réduire du fait de la diminution des liens interpersonnels avec un impact à terme sur la croissance, le commerce extérieur ainsi que sur les investissements étrangers et les financements internationaux. Ces effets restent toutefois difficiles à estimer.

Enfin, les répercussions autres que purement économiques, notamment les impacts socio-politiques avec, en particulier, une diminution du soutien au projet européen dont les accords de Schengen sont une de ses réalisations les plus tangibles, ne peuvent être négligées mais sont impossibles à évaluer.