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Note d'analyse
Publié le
Mercredi 14 Décembre 2016
Les résultats insatisfaisants de notre système éducatif et les impasses que rencontre aujourd’hui son pilotage centralisé conduisent à rechercher une plus grande autonomie des établissements scolaires. Ce concept peut cependant se traduire par des approches très différentes.
2017/2027 – Quelle autonomie pour les établissements scolaires ? – Actions critiques

La première repose sur une plus forte capacité d’auto-organisation locale, sans bouleverser le cadre existant. La deuxième instaure une modulation des moyens et des marges de manœuvre accrues pour les chefs d’établissement. La troisième promeut une nouvelle offre d’établissements privés ou proches du fonctionnement du privé couplée à la mise en place d’outils pour lutter contre le risque de sélection des élèves.

Quelle réforme prioritaire engager en matière de politique éducative ? Les difficultés à décliner les orientations nationales au niveau local[1], le maintien d’une forte uniformité de l’enseignement malgré l’accroissement des inégalités sociales et territoriales entre élèves[2] et les limites des dispositifs mis en œuvre pour remédier aux situations les plus défavorables[3] plaident pour engager le système éducatif français dans la voie de l’autonomie, en tirant les leçons des expériences étrangères.

Depuis les années 1980, afin d’améliorer la capacité des systèmes scolaires à remplir leur mission en s’ajustant aux besoins locaux et à l’hétérogénéité des publics, la majorité des pays développés ont redistribué les responsabilités dans les systèmes éducatifs, par la décentralisation politique vers les autorités locales, la déconcentration vers des échelons administratifs locaux ou les établissements eux-mêmes. Ces orientations ont pu être combinées : une large autonomie des établissements peut être réalisée avec un encadrement national (cas des Pays-Bas ou de l’Irlande) ou dans des systèmes décentralisés (cas des pays nordiques ou du Royaume-Uni)[4].

Notre pays s’est globalement tenu en retrait de ces transformations, perçues comme des vecteurs potentiels de rupture d’égalité, et les mesures prises en ce sens n’ont eu que des effets limités. L’autonomie des établissements n’est pas unidimensionnelle. Elle est un levier et non une fin en soi. Plusieurs options sont possibles, selon que l’on privilégie une capacité renforcée d’autonomie des communautés éducatives, une autonomie contractualisée qui autorise une modulation importante des moyens ou une autonomie soutenue par la diversification de l’offre scolaire et le choix des familles. Cette autonomie devra se coupler avec des stratégies plus efficaces d’allocation des ressources en fonction du profil socioéconomique des élèves et des problèmes d’attractivité des établissements sur certains territoires. Elle demeurera sinon plus théorique que réelle.

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Type d'image: 
Libre

2017-2027-actionscritiques-autonomie-etablissement-graphiques_1.jpg, par fcausse

 

Comme les autres institutions économiques et sociales françaises, l’École est aujourd’hui à la peine[5]. Malgré les nombreuses réformes entreprises, notre système éducatif connaît depuis les années 2000 une érosion de la performance scolaire des élèves les plus en difficulté (baisse de la part d’élèves atteignant le niveau de compétence attendu, particulièrement dans l’éducation prioritaire) et un décrochage de la part des élèves les plus performants (notamment en sciences et en mathématiques)[6]. L’École devrait voir sa mission clarifiée. Mais que l’on choisisse comme finalité prioritaire la préparation des enfants au monde professionnel, l’épanouissement de leur personnalité ou la transmission d’une culture commune, il apparaît nécessaire d’octroyer une autonomie accrue aux établissements scolaires[7].


1. Agacinski D., Harfi M. et Ly S. T. (2016), « Quelles priorités éducatives ? », note Enjeux 2017-2027, France Stratégie, mai.
2. Ly S. T. (dir.) (2016), Quelle finalité pour quelle école ?, rapport, France Stratégie, septembre.
3. Conseil national d’évaluation du système scolaire (2016), Inégalités sociales et migratoires. Comment l’École amplifie-t-elle les inégalités ?, septembre.
4. OCDE (2015), Perspectives des politiques de l’éducation 2015. Les réformes en marche, janvier.
5. Pisani-Ferry J., Lenglart F., Agacinski D. et Bon-Maury G. (dir.) (2016), Lignes de faille. Une société à réunifier, France Stratégie, octobre.
6. Wisnia-Weill V. (2014), « Augmenter aussi le nombre de bons élèves. Une lecture complémentaire de l’enquête PISA 2012 », La Note d’analyse, n° 12, France Stratégie, mai.
7. Ly S. T. (dir.) (2016), Quelle finalité pour quelle école ?, op. cit.

Auteurs

Marine Boisson
Marine
Boisson-Cohen
Anciens auteurs de France Stratégie
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