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Publié le
Mercredi 25 Mai 2016
« Inégalités », « fracture », « crise »… l’argument générationnel est de plus en plus souvent mobilisé dans une optique conflictuelle. Clé de lecture pertinente ou opposition gratuite ?
La guerre des âges n'aura pas lieu

Des treize enjeux du projet 2017-2027 soumis à la concertation, c’est sans doute celui qui a suscité le plus d’engagement. La question des inégalités intergénérationnelles a fait l’objet de vingt-sept contributions écrites et réuni soixante-dix participants lors du débat que France Stratégie lui a consacré le 19 mai dernier. Retour sur les éléments de consensus et de controverse de la séquence, restitués ici autour d’une idée force : il n’y a ni génération sacrifiée ni guerre des âges, mais une aspiration commune à l’autonomie…

Deux générations, un même objectif : l’indépendance

C’est en somme le message clé qui est ressorti de la phase de concertation autour de la note 17/27 « Jeunesse, vieillissement : quelles politiques ?». Pour les débatteurs, la convergence générationnelle des aspirations est un point de départ pour la réflexion plus légitime que la notion (hypothétique) de conflits liés aux inégalités. C’est de fait en flux tout au long d’une vie que se mesure l’équité intergénérationnelle et non en comparant les situations respectives des jeunes et des seniors à un instant T. Dans cette perspective, poser les jeunes en « génération sacrifiée » risque de caricaturer le diagnostic et de ne pas servir l’analyse. En d’autres termes, il y a consensus pour dire que les difficultés des jeunes et des seniors appellent deux analyses distinctes renvoyant par ailleurs à la même problématique : celle de l’indépendance dans la transition. Transition vers l’autonomie et l’emploi à un bout de la pyramide. Transition vers la retraite puis le grand âge, à l’autre bout. Enfin, il a semblé utile de rappeler que le financement des retraites comme celui de l’éducation relèvent du contrat social et ne sauraient être mis en concurrence. Les générations sont et resteront interdépendantes. Reste à mettre en œuvre des dispositifs de politiques publiques adaptés pour répondre à ces demandes d’autonomie aux deux bouts de la pyramide des âges.

L’autonomie de la jeunesse, à quand ?

C’est un fait, l’accès des jeunes à l’indépendance économique est tardif et précaire. Et parce qu’il ressort toujours des solidarités familiales, il est également et surtout inégalitaire. Il y a du reste une injonction politique paradoxale qui donne aux jeunes la responsabilité pénale à 13 ans, la majorité politique à 18, mais ne leur accorde la majorité sociale qu’à 25 (âge d’éligibilité au RSA) ! Que faire pour rétablir une cohérence allant dans le sens d’un véritable accès à l’autonomie ? Deux grandes séries de propositions sont ressorties du débat. D’abord, basculer d’un système de prise en charge familiale à des droits autonomes en incluant les jeunes dans les dispositifs de droit commun dès 18 ans : RSA, CPA (compte personnel d’activité), revenu minimum d’existence dans une perspective projective… Ensuite, créer des dispositifs spécifiques : allocation autonomie, extension de la garantie jeune, capital formation, salaire étudiant... Un consensus a par ailleurs émergé sur la nécessité de réformer le système éducatif et celui de la formation continue pour aller vers « l’égalité réelle » dans l’accès aux diplômes qui restent, en France, le facteur déterminant de l’insertion en emploi des jeunes.

Quel (nouveau) contrat social entre les générations ?

Et à l’autre bout de la pyramide des âges, quelles politiques et quels financements ? Si le débat a davantage traité de « la question des jeunes » en refusant l’opposition des générations, il a aussi été question des réformes nécessaires du système de retraites et du financement de « l’Alzheimer-boom ». En l’espèce, les débatteurs s’accordent à dire que l’allongement de l’espérance de vie et la subjectivité croissante des notions d’âge et d’activité plaident plutôt en faveur d’une retraite à la carte tenant compte des spécificités des carrières et des trajectoires de vie. Quelques-unes des idées dans le débat pour en témoigner : repenser la répartition des temps sociaux pour des parcours de vie qui ne sont plus sur trois temps étanches (école/formation/emploi) mais plus divers et flexibles, aller vers des comptes notionnels qui ne retiennent plus l’âge comme critère unique - tout en garantissant des conditions minimales - et réaffirmer le contrat social intergénérationnel. Enfin, pour répondre à la question du financement de la dépendance, la piste la plus évoquée est celle d’une réforme fiscale avec suppression du quotient familial et/ou participation des ressources patrimoniales au financement des dépenses publiques.

L’argument générationnel est donc une clé de lecture pertinente, mais pas nécessairement lorsqu’il s’agit de réfléchir aux moyens d’accès à l’autonomie… à tous les âges de la vie.

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Céline
Mareuge
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