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Publié le
Lundi 29 Juin 2015
Pour Jean Pisani-Ferry, commissaire général de France Stratégie, le risque d’une sortie de la Grèce de la zone euro comme celui d’une sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne mettent en péril l’intégration communautaire. Une interview publiée le 29/06/2015 dans le Monde.
Jean Pisani-Ferry, commissaire général de France Stratégie

 

Les négociations entre Athènes et ses créanciers sont au point mort. L’Eurogroupe s’est-il montré trop ferme avec la Grèce ?

Je dirais plutôt qu’il s’est montré trop rigide. Il a commis deux erreurs. La première est d’avoir voulu séparer les négociations sur l’adaptation du plan d’assistance en cours à d’éventuelles futures discussions sur l’allégement de la dette. On a perdu des mois à négocier sans parler de l’éléphant qui était dans la pièce d’à côté. Ce n’était pas tenable, puisque la question de la dette est une priorité pour Athènes

Par ailleurs, les discussions se sont encore une fois concentrées sur l’ajustement budgétaire, et ont moins porté sur les enjeux économiques comme la lutte contre les rentes, pourtant essentielle. Le gouvernement grec, qui a toute sa part de responsabilité dans cette affaire, et l’Eurogroupe ont échoué alors qu’un recalibrage intelligent du programme aurait permis d’y intégrer les nouvelles priorités politiques.

Que faire maintenant ?

Offrir une perspective nette aux Grecs, pour que leur décision de dimanche prochain se fonde sur un choix réel et pas sur une fausse question. Il faut leur dire haut et clair que s’ils votent oui, la discussion reprendra sur de nouvelles bases, sur tous les sujets y compris la dette, en vue d’aboutir à un nouveau cadre contractuel qui ne sera pas une version adoucie de l’ancien programme.

Même si l’on en ignore encore l’issue, quelles conséquences la crise grecque peut-elle avoir sur la zone euro ?

Cette crise est un test cardinal pour l’union monétaire. Aujourd’hui, deux grandes visions s’affrontent sur le sujet. Pour certains, notamment en Europe du Nord, la confiance dans la monnaie dépend avant tout du respect des règles communes : si la Grèce les piétine, l’euro est menacé. Il faut donc trancher : comme disent les Allemands, mieux vaut une fin effrayante plutôt qu’un effroi sans fin.

Pour d’autres, notamment en France, une sortie de l’euro minerait la confiance dans la monnaie, puisque celle-ci ne serait plus vue que comme un arrangement réversible. La difficulté est qu’il y a une part de vérité dans chacune de ces deux interprétations.

Quel serait le coût d’une sortie d’Athènes de l’euro (le « Grexit ») pour l’union monétaire ?

Il faut distinguer le choc à court terme sur les marchés financiers, avec le risque de contagion qu’il comporterait, et l’impact plus permanent. A court terme, la zone euro est mieux équipée qu’en 2012 pour faire face, notamment car la Banque centrale européenne (BCE) dispose de l’OMT [le programme des « opérations monétaires sur titres »] : elle serait en mesure de racheter massivement et de façon illimitée des titres de dette publique, afin de mettre à l’abri les autres pays qui pourraient être attaqués. Cela ne veut pas dire que ce serait facile.

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