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Communiqués de presse
Publié le
Jeudi 30 Juin 2022
Vecteur de connaissances scientifiques et de transparence démocratique, l'évaluation des politiques publiques est un outil incontournable pour rationaliser l'action publique et pour accroître la légitimité des décisions politiques. En 2018, France Stratégie avait publié une analyse bibliométrique sur les évaluations académiques de politiques publiques, montant que la France rattrapait son retard par rapport aux pays les plus avancés. Ces évaluations académiques sont-elles pour autant davantage citées dans le processus législatif et le débat public ? Symétriquement, quels types de travaux évaluatifs ont-ils été cités dans l'élaboration des lois depuis 2008 ? Dans quelle proportion les lois votées ont-elles été évaluées ex-post ? France Stratégie publie des travaux inédits visant à apporter des éléments de réponse à ces questions. L'étude comprend deux volets : « Qui utilise les évaluations académiques des politiques publiques ?» et « Quelles évaluations sont mobilisées avant et après le vote d'une loi ?». Un rapport détaille la méthodologie et les résultats.
Quelles évaluations des politiques publiques pour quelles utilisations ? - Image principale

Une analyse textuelle d'ampleur

Santé, éducation, finance, sécurité... sur un échantillon de 262 lois votées de 2008 à 2020, cette étude est la première à mesurer le nombre d'évaluations citées dans le travail législatif mené en amont du vote, et à mesurer le nombre de celles qui sont réalisées en aval. Elle est aussi la première étude, sur un échantillon aussi vaste, à relever les recommandations formulées dans ces évaluations, et à identifier celles qui sont suivies d'effet.

Les évaluations de politique publique sont de plus en plus mobilisées

Dans le processus législatif qui précède le vote des 262 lois étudiées, on relève un total de 4 734 citations de travaux à portée évaluative, soit 18 citations par loi. Le nombre de citations autour de chaque loi augmente dans le temps : 8 citations en 2008 contre 25 en 2020. Pour les projets de lois, 25 % des citations figurent dans les études préalables d'impact du gouvernement, les 75 % restants figurent dans les travaux parlementaires. Les travaux cités sont produits par des acteurs divers (administrations, parlementaires, acteurs privés, etc.). Les chercheurs en particulier sont très peu cités à travers leurs publications dans des revues scientifiques, mais ils le sont bien davantage à travers des policy briefs, des actes de colloques ou encore leurs contributions à des rapports institutionnels.

Une fois votée, 40 % des lois ont fait l'objet d'au moins une évaluation d'impact ex post. Cette proportion augmente d'abord, en passant de 41 % pour la période 2008-2012 à 52 % pour la période 2013-2017. Elle est plus faible pour les lois postérieures à 2018, du fait qu'une évaluation ex post est publiée en moyenne 4,5 années après le vote de la loi. Sur la période 2008-2020, cette proportion est particulièrement élevée pour les mesures des lois de finances (76 %), et faible pour les propositions de loi (25 %). Elle atteint 62 % pour les lois faisant l'objet d'une clause évaluative. Les lois portant sur le travail, l'économie, le logement, ou l'énergie ont été nettement plus évaluées que celles portant sur le tourisme, la recherche, la sécurité et la police, ou la fonction publique. La loi la plus évaluée a fait l'objet de 17 évaluations ex post. Il s'agit du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE).

Les lois évaluées faisant l'objet de recommandations en suivent au moins une dans 61 % des cas

Quand elles sont évaluées ex post, environ 7 lois sur 10 font l'objet de recommandations. Et 61 % de ces lois suivent au moins l'une de ces recommandations. Le taux de suivi des recommandations est plus élevé pour les lois qui comportent une clause évaluative (66 %) ou une clause expérimentale (72 %). De même, les éventuelles recommandations formulées par des chercheurs sont moins suivies d'effet (42 %), vraisemblablement du fait de la technicité de leurs évaluations et de leur plus faible visibilité auprès des décideurs. Par contraste, les recommandations formulées par des comités mixtes d'évaluations, associant l'État à d'autres acteurs (et notamment des chercheurs), sont davantage suivies d'effet que les autres évaluations (73 %).

France Stratégie et l'évaluation des politiques publiques : un savoir-faire éprouvé

Depuis sa création en 2013, France Stratégie s'investit de façon croissante dans sa mission d'évaluation des politiques publiques. Ses comités d'évaluation ont remis au Parlement et au Gouvernement plus d'une vingtaine de rapports d'évaluation, sur des politiques aussi variées que les « ordonnances Travail », la fiscalité du capital, la stratégie de prévention et de lutte contre la pauvreté ou encore le Plan de relance répondant à la crise sanitaire. Ces rapports visent à éclairer le débat public de façon indépendante, en reposant sur la collégialité des comités d'évaluation, et en mobilisant des méthodes scientifiques. L'intégralité des rapports est publiée sur son site internet.

France Stratégie produit également des travaux réflexifs sur l'exercice même de l'évaluation des politiques publiques, sur ses méthodes et ses pratiques. La présente étude s'inscrit dans cette réflexion, dont la vocation finale est à la fois de mesurer et de promouvoir la culture de l'évaluation des politiques publiques.