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Communiqués de presse
Publié le
Dimanche 16 Juillet 2017
Les exonérations générales de cotisations

Le comité de suivi des aides publiques aux entreprises et des engagements (COSAPE) a pour mission d’évaluer les différents dispositifs d’aides publiques mobilisables par les entreprises et de contribuer ainsi à la connaissance de leur impact, notamment sur la compétitivité, l’emploi, l’investissement et in fine la croissance. Animé par France Stratégie, il réunit partenaires sociaux, parlementaires, représentants des principales administrations concernées et experts.

Pour son premier rapport, le comité s’intéresse aux exonérations générales de cotisations sociales patronales, ciblées sur les bas salaires, qui se sont déployées par vagues successives depuis près de 25 ans en France. La mise en place des premiers allégements en 1993 visait à réduire le coût du travail au voisinage du Smic de façon à lutter contre le chômage des salariés peu qualifiés sans affecter leur pouvoir d’achat. À partir de 1998, l’extension de ces exonérations a eu pour objectif de contenir l’augmentation du coût du travail horaire induite par la réduction de la durée légale du temps de travail de 39 à 35 heures. Le Pacte de responsabilité et de solidarité a depuis 2015 amplifié ces exonérations sur les bas salaires, portant leur montant à plus de 25 milliards d’euros en 2015, ce qui en fait le plus important dispositif de soutien aux entreprises et à l’emploi peu qualifié.

Ce rapport vise à établir un état partagé des savoirs sur les exonérations générales de cotisations sociales, à réfléchir aux finalités qui leur sont associées et à identifier les angles morts de la connaissance sur leurs effets. L’évolution du contexte économique de la France en matière d’emploi, de qualification, de coût du travail et de compétitivité depuis les années 1990 appelle en effet à élargir l’analyse au-delà du seul effet de ce dispositif sur l’emploi.

Quels effets sur l’emploi ?

 Jusqu’à présent, l’essentiel des travaux d’évaluation ont en effet porté sur l’impact de ces dispositifs d’allégements généraux de cotisations sur le volume d’emploi en France. Il en ressort que la première vague d’allégements (de 1993 à 1997) a permis de créer ou de sauvegarder 300 000 emplois ; la deuxième vague (de 1998 à 2002), 350 000 ; la troisième (de 2003 à 2005) aurait eu un impact quasi nul. Soulignons toutefois que, par nature, ces évaluations ne permettent pas d’isoler les effets propres des exonérations de ceux des réformes qui leur sont liées : passage aux 35 heures lors de la deuxième vague, convergence vers le haut des multiples salaires minimum issus de la mise en place des 35 heures lors de la troisième vague.

Apprécier aujourd’hui l’efficacité des allégements nécessite d’analyser de façon plus large ces effets sur l’emploi. Le comité appelle ainsi à réaliser de nouveaux travaux, visant à :

  • évaluer les effets de long terme (de 1993 à aujourd’hui) de la politique d’exonérations de cotisations sociales sur l’emploi et caractériser les emplois créés ou sauvegardés grâce aux allégements selon différentes dimensions (sexe, diplôme, âge, expérience, secteur d’activité, taille d’entreprise) ;
  • évaluer spécifiquement les effets des dernières mesures du Pacte de responsa¬bilité ayant annulé les cotisations sociales patronales au niveau du Smic ;
  • comparer l’efficacité des exonérations générales de cotisations patronales avec des dispositifs alternatifs de type crédit d’impôt ;
  • examiner ce faisant l’efficacité marginale en termes d’emploi de ce renforcement continu des exonérations au cours du temps, afin de savoir si leur rendement est ou non décroissant.  

Quels effets sur les bas salaires ?

Les travaux existants ont essentiellement porté sur l’existence ou non d’un phénomène de « trappe à bas salaire », par lequel la dégressivité des exonérations inciterait les employeurs à contenir les augmentations salariales pour les peu qualifiés. Ces travaux concluent plutôt par la négative.

Par ailleurs, le rôle qu’a eu cette montée en puissance des allégements sur la dynamique du Smic – et plus généralement sur la dynamique de l’ensemble de l’échelle des salaires – a été très peu exploré. Le comité appelle donc à la réalisation de nouveaux travaux visant à :

  • évaluer sur longue période l’incidence des allégements sur les salaires, selon le niveau de salaire et de qualifications pour les salariés en poste comme pour les nouveaux embauchés ;
  • examiner la façon dont les exonérations de cotisations sociales patronales sont prises en compte dans la négociation collective, en particulier sur les salaires et les politiques salariales des entreprises ;
  • étudier les interactions entre les évolutions du Smic et les allégements de cotisations sociales ;

 Quels effets sur l'appareil productif ?

 Le contexte actuel conduit à envisager les effets des allégements non seulement sur l’emploi à bas salaires et la compétitivité-prix, mais aussi plus largement sur la structure du tissu économique français. L’impact d’une telle politique sur l’appareil productif, sa spécialisation et sa compétitivité hors coût est encore largement inconnu. Bien que ces questions soient complexes à appréhender, le comité appelle à la réalisation de nouveaux travaux visant à évaluer les conséquences des exonérations :

  • sur la spécialisation productive des entreprises et leur effort de « montée en gamme » ;
  • sur la qualification des salariés (effort de formation initiale et continue) ;
  • sur les investissements matériels et immatériels, l’innovation et donc la croissance potentielle.