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Publié le
Vendredi 22 Novembre 2013
Les débats régionaux organisés par le Commissariat général à la stratégie et à la prospective dans le cadre du chantier « Quelle France dans dix ans ? » ont continué avec une réunion publique à Strasbourg, consacrée au modèle social. La proximité de l’Alsace avec l’Allemagne a donné aux échanges entre universitaires, représentants d’institutions et d’entreprises, une tonalité particulière sur les thèmes des deux tables rondes : « Emploi, solidarité et dialogue social » et « Cohésion sociale et responsabilité sociétale des organisations ».
Retour sur le débat régional à Strasbourg

En Alsace, 8 % des actifs sont employés outre-Rhin. Mais depuis quelques années, l’Allemagne a moins besoin des ouvriers alsaciens et ces derniers n’ont plus envie d’y travailler. En cause, le niveau des salaires et la concurrence de la main-d’œuvre venue des anciens pays de l’Est, qui ont intégré l’Union européenne dans les années 2000. La directive de 1996 sur le détachement des travailleurs en Europe, aujourd’hui rediscutée à Bruxelles, fait ressortir les différences entre les modèles sociaux des pays de l’Union et les met en concurrence, selon Fabienne Muller, maître de conférence en droit social à l’université de Strasbourg : « Il est nécessaire d’aller vers une harmonisation sinon notre modèle social ne résistera pas au choc. ».

Si l’Allemagne se dote d’un salaire minimum, comme l’a annoncé le 21 novembre la chancelière Angela Merkel, ce sera un premier pas pour refréner le dumping social. Pour lutter contre les abus du détachement, le Parlement européen préconise dans un rapport de créer un « corps de contrôle européen » et de mettre en œuvre des sanctions pénales. Selon certaines estimations, il y aurait ainsi près de 18 000 salariés… Français détachés en France. Ils sont employés par des filiales d’entreprises françaises dans les pays frontaliers où les cotisations sociales sont plus faibles et travaillent dans l’hexagone. Mettre fin à ces dérives permettrait d’augmenter les recettes de la protection sociale.

Il y aurait matière à s’inspirer du régime local de la législation sociale en Alsace, qui accorde une plus grande place à la prévention. Ce changement d’orientation devrait aussi concerner les entreprises qui voient la médecine du travail et l’investissement dans l’amélioration des conditions de travail avant tout comme un coût : « Faire de la prévention permet d’éviter des accidents du travail mais aussi l’apparition de maladies professionnelles et donc de diminuer à long terme les coûts de réparation pour les employeurs et pour la société. » témoigne Aurélie Bouabca, inspectrice du travail.

Dans le maintien de la cohésion sociale, les entreprises ont également un rôle important à jouer, la plupart des intervenants s’en montrent convaincus. « L’identité professionnelle est constitutive de l’identité sociale, explique Isabelle Barth, directrice générale de l’EM Strasbourg Business School. La crise que nous traversons accentue les crispations entre les individus. Les entreprises doivent travailler sur la confiance et la reconnaissance des salariés. »

Dans l’imaginaire des Français, le facteur demeure un élément fort du lien social, particulièrement dans les zones rurales et auprès des personnes âgées : « Il rend de menus services, apporte du pain ou des médicaments, précise Jacques Perrier, délégué régional de La Poste région Est. Mais est-ce encore son rôle dans le monde moderne ? L’attachement de nos concitoyens à cette figure de la cohésion sociale pourrait nous conduire à réfléchir pour enrichir sa mission, avec une aide aux personnes dépendantes par exemple. »

La lutte contre l’exclusion gagnerait à sortir d’un système vertical pour une meilleure collaboration entre les acteurs, avec une plus grande responsabilisation des individus. « L’intelligence collective se développe de façon intéressante grâce à Internet et aux réseaux sociaux, juge François Loos, vice-président du Conseil régional. On le voit avec le crowdfunding (financement participatif de projets favorisant l’entraide). » D’autres initiatives sur le terrain - création de monnaies locales, réseaux d’échange d’objets de seconde main, etc – pourraient nourrir l’innovation sociale.

 

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