La responsabilité sociale des entreprises se définit comme la manière dont les entreprises intègrent, sur une base volontaire, des préoccupations sociales, environnementales et éthiques dans leurs activités économiques comme dans leurs interactions avec toutes les parties prenantes, qu’elles soient internes (dirigeants, salariés, actionnaires, etc.) ou externes (fournisseurs, clients, etc.). Ce sujet recueille une audience qui s’étend progressivement à toutes les sphères d’activité. Industriels, responsables associatifs, hommes politiques et experts sont toujours plus nombreux à réclamer une mobilisation collective pour mieux appréhender cette thématique dans ses différentes dimensions. Ils y voient une occasion de repenser le modèle de l’entreprise du XXIe siècle et de susciter de nouvelles dynamiques de croissance durable et inclusive. La Commission européenne incite même les États membres à adopter une nouvelle approche résolument « stratégique » de la RSE, avec l’objectif de concilier exigence de compétitivité et responsabilité sociale. La question n’est donc plus de savoir si les entreprises doivent s’engager en matière de responsabilité sociale et environnementale mais plutôt comment y parvenir. On est loin de la formule de Milton Friedman selon laquelle « la seule responsabilité sociale de l’entrepreneur est d’augmenter ses profits » (The New York Times Magazine, 13 septembre 1970). Encore faut-il s’entendre sur la définition de la RSE.
Dans ce contexte, les auteurs de l’étude ont cherché à apporter des éléments de réponse objectivés à deux principales questions : peut-on considérer que le souci de responsabilité sociale est aussi un souci de compétitivité, donc de performance économique ? Si tel est le cas, comment inciter les entreprises à inclure des démarches RSE dans leur stratégie de développement ? Faut-il par exemple les laisser libres dans leur engagement ou au contraire instaurer des mesures contraignantes ? Après avoir dressé un rapide panorama de la réglementation en vigueur en France, les auteurs font le point sur la mise en œuvre de la RSE sur le terrain, dans les entreprises françaises. Il s’agit non seulement de constater si et comment elles s’en sont emparées, selon le secteur, la taille, la localisation, mais aussi de connaître leur perception de la RSE et leurs attentes. Comment la RSE se diffuse-t-elle dans les régions françaises ? L’étude examine le lien entre la RSE et la performance économique des entreprises. Pour ce faire, elle passe en revue les travaux existants – en France comme à l’étranger – et produit une analyse originale sur les données individuelles d’entreprise. Cette analyse est inédite pour deux raisons. D’une part, elle porte sur un très large échantillon d’entreprises – environ 8 500 – en incluant les PME d’au moins dix salariés. D’autre part, elle prend en compte, ce qui est rarement le cas, plusieurs dimensions constitutives de la RSE : environnement et éthique, ressources humaines, relation client et relation fournisseur.
De nombreux constats et enseignements se dégagent de ce travail. Tout d’abord, malgré les nombreuses initiatives, les entreprises françaises mobilisent encore peu la RSE, avec de fortes disparités selon la taille et les territoires. Alors que les travaux existants demeurent peu concluants sur le lien entre RSE et performance économique, la méthodologie adoptée ici permet d’apporter des éléments de réponse robustes : la RSE procure un gain de performance en moyenne de l’ordre de 13 % par rapport aux entreprises qui ne l’introduisent pas (toutes choses égales par ailleurs), en particulier quand elle relève de l’initiative volontaire et non de mesures contraignantes. Prendre en compte les intérêts des autres parties prenantes peut ainsi constituer, au-delà des déclarations de principes, un véritable enjeu concret et tangible pour les entreprises (et pour toutes les parties prenantes). Les auteurs plaident ainsi pour le développement d’une stratégie française axée sur la responsabilité et la compétitivité.