
L’étude de France Stratégie est originale à deux titres :
- elle mesure la répartition de l’emploi public à une échelle fine, la zone d’emploi, là où les analyses existantes se limitent en général à des comparaisons entre départements. Deux indicateurs sont retenus pour étudier les variations territoriales : le taux d’administration – le nombre d’emplois publics pour 100 habitants, qui est de 8,8 en moyenne en France, et la part de l’emploi public dans l’emploi total, qui est proche d’un quart en moyenne nationale ;
- elle décompose l’emploi public selon le secteur d’activité et l’employeur, mais y ajoute une distinction selon le type de service rendu (local ou non local). Est considéré comme « local » un établissement qui produit un service en direction des usagers de sa zone d’emploi. Sur les 5,8 millions d’emplois publics étudiés, les services « locaux » représentent 3,4 millions d’emplois relevant de l’État (écoles, collèges) ou des collectivités territoriales (crèches, voierie). 1.3 million d’emplois, soit 22 % du total, se situent dans un établissement non local (ministères et bases militaires au niveau national, universités au niveau régional, préfectures au niveau départemental).
Des inégalités de dotations qui s’expliquent avant tout par l’emploi non local
Avec un taux d’administration de 10 emplois publics pour 100 habitants, l’Île-de-France et la Corse arrivent en tête du classement ; les Pays de la Loire se trouvent à l’autre extrémité avec un taux d’administration égal à 7,5. Ces écarts entre régions s’expliquent avant tout par l’emploi non local : alors qu’il pèse moins du quart de l’emploi public, il contribue à 75 % des écarts de taux d’administration entre régions.
Les grandes métropoles sont en moyenne plus pourvues en emploi public que les villes moyennes et les zones rurales. L’emploi public non local est le principal responsable de ces écarts, puisqu’il est surtout concentré dans les grandes agglomérations et certaines capitales administratives. La répartition de l’emploi local est en revanche plus homogène, sans désavantage marqué pour les zones peu denses. Quant à la part de l’emploi public dans l’emploi total, il ne varie que très peu avec la densité des territoires.
Une forte hétérogénéité qui ne semble pas correspondre aux besoins des territoires
Ces moyennes masquent toutefois une forte hétérogénéité : les taux d’administration peuvent varier du simple au double entre zones d’emploi de même densité. Un quart des zones d’emploi des unités urbaines de 100 000 à 500 000 habitants (Limoges, Besançon, Poitiers, Brest, Amiens) et 10 % des zones de moins de 100 000 habitants (Draguignan, Ajaccio, Châlons-en-Champagne, Bourges) ont ainsi un taux d’administration comparable ou supérieur à celui des grandes métropoles. À l’inverse, certaines zones d’agglomérations de plus de 100 000 habitants – c’est le cas notamment de Thionville, Villefranche-sur-Saône, Douai, Saint-Omer, Mulhouse ou Saint-Nazaire – ont un taux d’administration inférieur à 6,5.
Cette hétérogénéité ne semble pas corrélée aux besoins des territoires : le taux d’administration est plus faible dans les zones à fort taux de chômage, et plus élevé dans les zones à fort potentiel financier.
Des pistes pour faire évoluer la répartition de l’emploi public sur le territoire
Les pistes d’évolution se situent principalement du côté des emplois non locaux, concentrés aujourd’hui dans les grandes agglomérations. France Stratégie invite à aller plus loin que le transfert de services de l’État situés en Ile-de-France, en réallouant progressivement au fil des départs en retraite des emplois des grandes métropoles vers les zones les plus en difficulté (nord du pays, ouest du pourtour méditerranéen). Le numérique, parfois soupçonné de contribuer au recul de l’emploi public sur les territoires, pourrait en fait constituer un véritable levier de soutien pour les territoires en difficulté.