Document de travail Biomasse agricole : quelles ressources pour quel potentiel énergétique ? La biomasse agricole est une ressource multifonctionnelle qui peut être considérée comme une source d’énergie ou de matériaux renouvelables à faible empreinte carbone dans la limite des disponibilités en sols, en matière organique et en eau, et des compétitions d’usage. Publié le : 29/07/2021 Temps de lecture 7 minutes En France, la diversité des ressources naturelles et les objectifs de lutte contre le réchauffement climatique en font un atout potentiel pour la décarbonation des activités dans de multiples secteurs de l’économie. D’abord, de quels gisements parle-t-on ? Les pouvoirs publics soutiennent l’utilisation accrue de la biomasse pour la production d’énergie ou de produits biosourcés. L’ambition de la France en la matière, pour atteindre l’objectif de neutralité carbone en 2050, passera nécessairement par une augmentation de la production de biomasse parallèlement au développement des « puits de carbone » naturels comme les forêts et terres agricoles. Ainsi la Stratégie nationale bas-carbone (SNBC) prévoit un potentiel énergétique de production en ressources en biomasse atteignant 430 TWh en 2050, dont 250 TWh pour la biomasse agricole (contre actuellement environ 40 TWh). Parce qu’elle se conjugue à la demande d’une production agricole plus durable qui interroge le modèle agricole conventionnel, la mobilisation de la biomasse nécessite cependant de nombreux arbitrages : quelle utilisation des terres ? quelle accessibilité des gisements ? comment intégrer les enjeux de séquestration du carbone et de biodiversité ? À partir de données issues d’études, de rapports et d’entretiens, ce document de travail apporte des éléments d’éclairage à ces enjeux, en quantifiant les principaux gisements de biomasse agricole existants afin d’évaluer leur valorisation possible. Un travail de projections sur la base de plusieurs hypothèses vient ensuite s’ajouter pour tenter d’estimer le potentiel en biomasse disponible à l’horizon 2050 (en misant sur une production additionnelle). Cette démarche se fonde sur l’estimation des volumes totaux de biomasse produits, ceux disponibles – en tenant compte des volumes non accessibles et des besoins agronomiques des sols –, mais aussi des volumes supplémentaires mobilisables (les disponibilités supplémentaires des gisements existants) en estimant les volumes actuellement mobilisés pour divers usages (alimentation, litière, paillage, énergie….). Ces différents volumes, annuels et à l’échelle nationale, sont présentés ou bien en tonnes de matière brute (tMB) ou bien en tonnes de matière sèche (tMS). Le tableau suivant rend compte des volumes supplémentaires disponibles (VSD) pour chaque catégorie de ressource non alimentaire, en détaillant les volumes disponibles et mobilisés pour des usages énergétiques/matériaux (sur la base de données antérieures à 2020). La mobilisation effective de l’ensemble des gisements existants (VSD) est envisageable pour l’ensemble des ressources à l’horizon 2050. En ce qui concerne les cultures alimentaires annuelles, les disponibilités supplémentaires sont considérées nulles pour tenir compte de leur vocation exclusivement alimentaire. La traduction des volumes supplémentaires disponibles en équivalent énergie permet d’estimer un potentiel énergétique associé. Les estimations présentées restent purement théoriques (toutes choses étant égales par ailleurs) et décrivent un potentiel maximal, ne pouvant être atteint qu’à un horizon lointain, avec une mobilisation exclusivement énergétique de l’ensemble des gisements supplémentaires supposés disponibles. Ce travail a été mené après identification des taux de conversions énergétiques associés pour pouvoir estimer leur potentiel énergétique, qui varie avec l’usage (combustion, méthanisation). Que constate-t-on au terme de ces calculs ? Le potentiel maximal de disponibilité en biomasse ainsi obtenu révèle que les objectifs fixés par la SNBC ne seront pas atteints si on prend uniquement en compte les disponibilités supplémentaires actuelles (qui ne sont pas encore valorisées). Ces disponibilités représenteraient en effet au maximum 80 TWh PCS à l’horizon 2050. Une mobilisation accrue de la biomasse agricole, notamment à des fins énergétiques, devrait tenir compte de l’évolution plus globale de notre système alimentaire ainsi que des impératifs de préservation des écosystèmes. Dans un second temps, l’étude tente d’évaluer le potentiel d’évolution en biomasse agricole sur le long terme. Cette démarche vise à établir des projections de production intégrant certains des facteurs pouvant avoir un impact sur la disponibilité de la biomasse et donc sur sa mobilisation : c’est le cas notamment de la transition vers un système alimentaire et agricole plus durable ou encore du dérèglement climatique. L’élaboration de deux scénarios à l’horizon 2050, l’un « tendanciel », l’autre « agroécologique », reposant sur plusieurs hypothèses en termes d’utilisation des terres, de pratiques agricoles, de cheptels, etc., permet d’établir de nouveaux potentiels énergétiques. Selon ces projections, des écarts conséquents restent visibles avec le potentiel estimé par la SNBC, écarts qui peuvent s’expliquer par différents facteurs méthodologiques : méthodes d’estimations, choix retenus en termes de surfaces, rendements agricoles et d’arbitrages sur les vecteurs énergétiques, incertitudes liées aux cultures dédiées pérennes et annuelles. Ces travaux de quantifications et de projections soulignent l’impact de quelques facteurs externes sur la disponibilité de la biomasse et montrent que l’adoption massive de nouvelles pratiques agricoles – comme les cultures intermédiaires – permet d’augmenter la disponibilité en biomasse. Dans le cas du scénario « agroécologique », le développement de ces cultures concernerait plus de 12 Mha (environ 45 % de la SAU projetée) en parallèle de la mise en place de pratiques agroforestières sur près de 3 Mha (10 % de la SAU). Les potentiels estimés restent cependant en deçà des objectifs de production de la SNBC. Une hausse des prélèvements (dans le cas des résidus) associée à un développement massif des cultures dédiées, pérennes et annuelles pourrait augmenter la disponibilité en biomasse agricole. Elle suppose toutefois des arbitrages forts concernant la redistribution des terres agricoles. À ces incertitudes s’ajouteraient la forte variabilité de la disponibilité de certains résidus et l’évolution des besoins alimentaires qui sont prioritaires. Partager la page Partager sur Facebook - nouvelle fenêtre Partager sur X - nouvelle fenêtre Partager sur Linked In - nouvelle fenêtre Partager par email - nouvelle fenêtre Copier le lien dans le presse-papier Ecouter le podcast Transcription Fermer la transcription - Téléchargement Biomasse agricole : quelles ressources pour quel potentiel énergétique ? Télécharger la note de synthèse PDF - 2 104.8 Ko Télécharger le document de travail PDF - 3 262.8 Ko Thèmes Changement climatique Alimentation/agriculture Publié par France Stratégie Auteurs Julien Fosse Ilyas Mourjane Citer ou exporter Citer cette publication Fermer Citer cette publication Autres options d'export Pour aller plus loin Les services rendus par la biodiversité et les écosystèmes. Quelle prise en compte dans les politiques publiques ? « Le temps du déni est révolu. Nous ne sommes pas seulement en train de perdre la bataille contre le changement climatique, nous s... Ressources naturelles/biodiversité Autres contenus 15 mai 2018 Les performances économiques et environnementales de l’agroécologie Le développement de l’agroécologie est une alternative souhaitable à l’agriculture « conventionnelle » pour engager la transition ... Changement climatique Alimentation/agriculture Santé Note d’analyse 06 août 2020
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