Document de travail Maîtriser la consommation énergétique du numérique : le progrès technologique n’y suffira pas Avec un double phénomène d’augmentation du nombre des internautes et d’explosion des usages mobiles, le secteur numérique vit un âge d’or qui se traduit dans les faits par une croissance exponentielle du nombre d’équipements connectés à internet et par une explosion du trafic IP dans les réseaux télécoms et les data centers. Publié le : 22/10/2020 Temps de lecture 6 minutes Cette révolution n’est cependant pas sans conséquence sur la consommation énergétique du numérique, qui croît elle aussi à un rythme soutenu. Ainsi, selon le Shift Project, en seulement cinq ans, entre 2013 et 2017, la consommation globale du numérique a augmenté de 50 %, passant de 2 000 à 3 000 TWh par an. À titre de comparaison, sur cette même période, la consommation électrique mondiale a crû d’un peu moins de 10 % et atteignait 21 500 TWh en 2017. D’ici 2025, la consommation énergétique du numérique devrait continuer à croître à un rythme annuel de 10 % et pourrait se situer entre 5 700 et 7 300 TWh en 2025. Si la croissance de la consommation du numérique est portée par l’ensemble de ses segments – équipements terminaux, réseaux télécoms, data centers et production desdits équipements et infrastructures –, la production a été ces dernières années et restera à horizon 2025 le principal poste de consommation du numérique : elle représente 45 % de la consommation totale du secteur et cette part devrait rester aux alentours de 40 % d’ici 2025. La croissance énergétique du numérique est particulièrement forte comparée à la croissance de la consommation énergétique mondiale tous secteurs confondus : en 2017, le numérique représente environ 2,7 % de la consommation globale d’énergie finale au niveau mondial et devrait en représenter en 2025 entre 4,7 % et 6 %, soit un quasiment doublement par rapport à 2017. La traduction de cette consommation d’énergie en émissions de gaz à effet de serre est elle aussi inquiétante : le numérique représente 3,4 % des émissions totales de GES en 2017 soit 1,8 GtCO2e et devrait représenter 7,6 % en 2025 soit 3,7 GtCO2e. Deux technologies émergentes suscitent par ailleurs de fortes craintes en termes énergétiques : les crypto-monnaies et l’internet des objets. Les crypto-monnaies reposant sur des blockchains publiques constituent bien un moteur de la croissance de la consommation énergétique du numérique, mais représentent à ce jour une part encore faible de la consommation totale : entre 60 et 200 TWh en 2018. Cette consommation est cependant souvent perçue comme « non efficace » au regard de l’utilité sociale actuelle des crypto-monnaies et pourrait être drastiquement réduite si les systèmes de preuve de participation étaient privilégiés. La consommation énergétique de l’internet des objets est encore peu étudiée. On sait cependant que les équipements IoT sont ceux dont la consommation devrait croître le plus à horizon 2030. Cette croissance devrait être essentiellement portée par la consommation des dizaines de milliards d’objets attendus, tandis que la consommation supplémentaire qu’ils induisent en amont dans les réseaux télécoms et les data centers devrait rester faible. La consommation liée à la production, qui risque d’être élevée, n’est à ce stade pas documentée. Au final, l’adjonction d’une fonction de connexion à une multitude d’objets devrait avoir une incidence sur l’évolution de la consommation globale du numérique et la consommation de ce nouveau segment du numérique devrait, dès lors, être étudiée. Face à ces enjeux, la réponse traditionnelle aux problèmes liés à la consommation énergétique croissante du numérique a reposé et repose encore essentiellement sur les gains énergétiques liés au progrès technologique. Le progrès technologique dans les grandes infrastructures numériques – réseaux télécoms et data centers – permet de réels gains énergétiques unitaires : par exemple, concernant les réseaux d’accès fixe, les réseaux en fibre optique PON consomment entre 0,2 et 0,8 W/utilisateur contre 3 et 5W/utilisateur pour les réseaux cuivre VDSl. Néanmoins, les inefficacités qui perdurent dans la gestion des infrastructures (notamment l’existence en parallèle de plusieurs générations de réseaux télécoms et la non-optimisation du taux d’utilisation des équipements dans les data centers) et surtout l’accroissement des usages et in fine du trafic internet, ne permettent pas de maîtriser la consommation globale. Par ailleurs, ce levier n’agit pas sur la consommation énergétique liée à la production des équipements et laisse donc de côté un poste majeur de la consommation du numérique. Ce document de travail, deuxième d’une série de trois documents[1], s’appuie sur les travaux présentés lors d’un cycle de séminaires sur l’impact environnemental du numérique qui s’est tenu à France Stratégie en 2018-2019. [1] Dedryver L. et Couric V. (2020), « La consommation de métaux du numérique : un secteur loin d’être dématérialisé », Document de travail, n° 2020-05, France Stratégie, juin. 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