Télécharger le rapport : Bilan et perspectives (2015-2017) du Réseau emploi compétences
« Renforcer notre capacité collective d’observation et de prospective » pour développer un emploi de qualité. C’est la feuille de route ambitieuse confiée par l’État et les partenaires sociaux au Réseau Emplois Compétences (REC) qui voit le jour en 2013 dans le sillage de la Grande Conférence sociale. Animé par France Stratégie, le Réseau a fait un bout de chemin depuis le lancement de ses travaux en avril 2015 et publie aujourd'hui son premier rapport d’activité. Bilan d’étape avec Sandrine Aboubadra-Pauly, expert à France Stratégie, et Marième Diagne, chargée d’étude au département Travail, emploi, compétences, toutes deux en charge du Réseau.
« Renforcer notre capacité collective » d’anticipation, ça veut dire quoi concrètement ?
Sandrine Aboubadra-Pauly : Ça signifie produire de la connaissance sur le lien formation/emploi, notamment comprendre comment les entreprise recrutent et comment elles pourraient mieux recruter, définir une méthodologie adaptée pour faire de la prospective des métiers et des qualifications au niveau des territoires et des branches, et identifier les compétences de demain. Cette connaissance, le Réseau la met à la disposition des décideurs et de tous les acteurs qui mettent en œuvre les dispositifs de politiques publiques en matière d’emploi et de formation parce qu’ils ont besoin de comprendre comment fonctionne le marché du travail.
Marième Diagne : Une des spécificités du Réseau, c’est la co-production de cette connaissance. On ne délivre pas un diagnostic descendant. Bien au contraire. Il résulte d’une réflexion collective organisée par groupes de travail dans lesquels tous les intervenants sont forces de proposition, de débat et de co-écriture. Or, parmi ces intervenants, tous les acteurs sont représentés : observatoires de branche, observatoires régionaux emploi-formation – Carif-Oref – partenaires sociaux, régions et OPCA [organismes paritaires collecteurs agréés chargés de collecter les fonds de la formation professionnelle continue et de financer la formation des salariés], représentants des administrations centrales concernées et organisations qui produisent de l’expertise sur le sujet – le Céreq par exemple. En chiffres, depuis 2015, c’est 400 participants, 200 institutions représentées et cinq groupes de travail !
Comment ont fonctionné les groupes de travail du REC ? Et quel bilan en tirez-vous par rapport aux attendus ?
Marième Diagne : Les groupes de travail ont fonctionné comme un lieu d’échanges et de débat. Si les partenaires sociaux et l’État ont demandé la création du REC, c’est du reste précisément parce qu’il y avait besoin de ce lieu pour des acteurs qui autrement n’avaient pas l’occasion ou l’espace pour travailler ensemble et élaborer ce qu’on appelle un diagnostic partagé sur des problématiques pourtant communes.
Sandrine Aboubadra-Pauly : Cette notion de partage est particulièrement importante, pour ne pas dire nécessaire, quand on fait de la prospective. La prospective est un exercice complexe. On est rarement sûr de ne pas se tromper ! Partir d’une méthodologie commune et co-produire des scénarios au sein d’un réseau d’acteurs réduit les risques liés à l’incertitude.
Marième Diagne : En termes d’organisation, un groupe de travail fonctionne comme un espace de concertation qui a pour matière ses propres contributions et celles de personnes qualifiées auditionnées. L’objectif est toujours de parvenir à des conclusions utiles et partagées. Par exemple, le groupe de travail sur le numérique a arrêté un répertoire des métiers « au cœur » du numérique découlant d’une vision prospective partagée des emplois et des compétences de la filière. Celui sur les compétences transversales et transférables a formulé des propositions sur les types de certification permettant d’identifier et de valoriser ces compétences sur le marché du travail. Les groupes de travail, à l’inverse du Comité de pilotage du REC, sont non permanents. Ils sont mobilisés sur une problématique spécifique pour une période déterminée.
Après deux ans de fonctionnement du réseau et de nombreuses publications à son actif, si vous deviez n’en retenir qu’une, ce serait laquelle ?
Sandrine Aboubadra-Pauly : C’est impossible de faire un choix ne serait-ce que du fait de leur diversité ! Le REC a travaillé – en plus des sujets déjà évoqués – sur les saisonniers avec notamment pour enjeu de les dénombrer, sur les moyens de renforcer la capacité de recrutement des entreprises, sur les méthodes de la prospective sectorielle et régionale de l’emploi – un sujet plus technique… Ce que je retiens surtout, avec le recul, c’est qu’aussi divers que soient ces rapports, ils ont tous en commun de renseigner sur cette complexe relation entre offre et demande d’emplois et de compétences. C’est un fil rouge… qui fait quelque part l’identité du Réseau.
Le REC publie son premier un rapport d’activité dont une partie est consacrée aux perspectives d’avenir. Vous pouvez nous en dire quelques mots ?
Sandrine Aboubadra-Pauly : L’anticipation des compétences conservera une place centrale. C’est une certitude. Ensuite, il y aura sans doute moins de groupes de travail mais des séminaires d’échange de pratiques et d’informations, plus d’expérimentation et une forme de territorialisation des réflexions. Le travail prospectif en cours sur les emplois et les compétences de la filière valorisation des déchets en est un bon exemple.
Marième Diagne : Nous projetons aussi d’ouvrir le Comité de pilotage à de nouveaux membres, notamment des représentants des partenaires sociaux et des administrations centrales, et de créer un lieu d’échange de statistiques publiques. Nous voulons aussi améliorer le ciblage de nos publications, les adapter à nos différents publics-utilisateurs – les acteurs de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelle – pour qu’ils se les approprient plus et mieux.
Retour sur deux années de « vision prospective partagée de l’emploi et des compétences ».
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Propos recueillis par Céline Mareuge, journaliste web